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mardi 29 septembre 2015
New Order : Retour aux sources (Libération)
New Order est de retour, après des années de silence discographique et d’horreurs échangées par autobiographies interposées. La sortie de Music Complete nous offre l’occasion d’une tentative de résumé de sa riche carrière en cinq dates charnières.
18 mai 1980 : Le suicide de Ian Curtis
C’est à cette date, un dimanche, que Ian Curtis, leader et chanteur de Joy Division, se donne la mort, à 23 ans, en se pendant dans sa cuisine, alors que le groupe s’apprêtait à entamer sa première tournée américaine. Les membres restants, Bernard Sumner (guitare), Peter Hook (basse) et Stephen Morris (batterie), fondent New Order un mois plus tard. Les trois orphelins se relaient derrière le micro pour leurs premiers concerts et l’enregistrement des démos. Stephen Morris est d’abord pressenti pour devenir le chanteur, mais c’est finalement Bernard Sumner qui sera désigné par leur manager Rob Gretton et le producteur Martin Hannett, lors d’une «compétition interne» de chant.
9 juillet 1983 : La vidéo de «Confusion»
Bernard Sumner se souvient d’une nuit de clubbing à New York passée à regarder les gens en se disant «ce serait chouette s’ils dansaient sur notre musique». C’est Ruth Polsky, qui s’occupait alors de leur tournée américaine, qui initia le groupe aux joies du nightclubbing à une époque où la nuit new-yorkaise était l’une des plus excitantes. La Danceteria, le Peppermint Lounge, le Studio 54, le Paradise Garage (temple pré-house où New Order a même donné un concert), c’est sur les pistes de ces clubs légendaires que sont nées les idées de Blue Monday et Confusion, les deux tubes qui marquent la véritable naissance d’un groupe qui se débarrasse en 1983 du poids de Joy Division. Mais c’est au Funhouse, l’antre du génial DJ latino John «Jellybean» Benitez, petit ami de Madonna à l’époque, qu’Arthur Baker (le producteur à la dégaine d’ours du Planet Rock d’Afrika Bambaataa) et New Order sont venus, fébriles, tester les bandes de Confusion. Au même endroit, ils tournent le 9 juillet 1983 une amusante vidéo pour ce classique de l’electro (lire page suivante), qui apparaît aujourd’hui comme un document essentiel sur les fantaisies capillaires et vestimentaires du siècle dernier.
30 janvier 1989 : La synthèse «Technique»
Plus de deux ans après Brotherhood, qui consacrait une face au rock électrique et une autre à la dance électronique, Technique réussit la synthèse parfaite entre guitare «indie» et culture dance. Précédé d’un single, Fine Time, dont la pochette est une pluie de gélules d’ecstasy multicolores, ce cinquième album (le dernier pour le label Factory) qui sort le 30 janvier 1989 est fortement influencé par l’acid house balbutiante. Hédoniste, le disque est le fruit de quatre mois de travail plus ou moins intensif sous le soleil d’Ibiza. Des sessions d’enregistrement rarement sobres. Son succès va marquer le premier pas de la mutation de Manchester, la ville grise, en Madchester, la cité jouisseuse et sexy où la dance music triomphe. L’Haçienda, club détenu en partie par les membres de New Order, explosant enfin après des années de vache maigre pour devenir l’épicentre du mouvement acid house anglais.
21 mai 1990 : La Coupe du monde de foot
A l’occasion de la Coupe du monde de football en Italie, New Order, rebaptisé pour l’occasion EnglandNewOrder, compose l’hymne officiel de l’équipe d’Angleterre. Coécrites par «Barney» Sumner et l’acteur comique Keith Allen (père de la chanteuse Lily Allen), les paroles de World in Motion resteront à jamais gravées dans les mémoires à cause du refrain «E for England» (comprendre «Ecstasy pour l’Angleterre»). Sans oublier le rap du joueur de Liverpool John Barnes ou les chœurs scandés par une partie de l’équipe nationale, dont l’attitude assez lourde en studio ne laissera pas de bons souvenirs à la claviériste Gillian Gilbert. Loin d’être le meilleur titre de New Order, World in Motion est pourtant leur seul et unique single à atteindre la première place des charts britannique.
17 octobre 2011 : La première reformation
C’est sans Peter Hook, son éruptif bassiste qui a quitté le groupe en 2007, que New Order se reforme en octobre 2011 pour deux concerts caritatifs en soutien au vidéaste new-yorkais Michael Shamberg, collaborateur de longue date. Ce qui ne devait être que deux prestations live sans lendemain (à Bruxelles et Paris) après six ans d’absence se transforme en lucratif come-back. Alors que Peter Hook attaque en justice ses ex-comparses pour utilisation frauduleuse de la «marque», le groupe s’embarque avec un nouveau bassiste dans une tournée mondiale, avant de signer pour un neuvième album sur le label Mute. Après deux disques marqués par la prédominance des guitares, Music Complete est une agréable surprise, portée par d’irrésistibles beats dance et un certain parfum de nostalgie. Trente-cinq ans après, New Order fait toujours du New Order.
Benoît Carretier , Libération du 25 septembre 2015
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