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samedi 11 mars 2017
Tout le monde n’a pas la chance de ressentir le frisson musical… Pourquoi ? (L'Humanité)
Une chanson, un passage musical et voilà que vous avez la chair de poule. La science commence à expliquer ce phénomène ressenti par 56 à 85% des êtres humains.
L’accès à toutes sortes de musiques s’est considérablement développé au cours du 20e siècle. Pas pour rien que depuis une cinquantaine d’années, des chercheurs s’intéressent à ce que l’on appelle en français « le frisson musical ». Certains d’entre eux, y préférant le terme anglo-saxon, « skin orgasm », l’orgasme de la peau.
S’il est vrai que d’autres événements de l’existence peuvent provoquer cette réaction épidermique (un câlin avec l’être aimé, une scène de cinéma, une foule unie…), la musique en est un déclencheur particulier. France Musique a organisé des conférences à ce sujet.
Avoir « les poils qui dressent » à l’écoute d’un passage musical, un refrain, serait un phénomène ressenti par seulement les deux tiers des êtres humains de la planète.
Une étude de l’université américaine, la Eastern Washington University, a conclu que la capacité à ressentir ce type d'émotion était liée à " l'Openness to Experience " (la réceptivité à l'expérience). Elle montre que le frisson est plus développé chez des personnes « ouvertes à l’expérience ». Pour des raisons d’ordre émotionnel ( sensibilité à la beauté de la nature, capacités imaginatives, amour de la vie, …) et pour des raisons d’ordre cognitif ( soif d’apprendre, curiosité envers tout ce qui est nouveau, étranger…)
Le frisson, qui joue un rôle pour lutter contre le froid, nos ancêtres préhistoriques l’avaient déjà développé. Il a participé à la survie de l’Homme soumis aux aléas des changements de température. Mais, revenons à la musique.
Dans le laboratoire de l’Université de Washington, l’expérience menée sur 45 personnes bardées de capteurs a permis de mesurer la « réponse galvanique de la peau ». Une manière de mesurer les « changements électriques de la peau » face à un stimuli d’ordre musical.
Parmi les morceaux utilisés : Les deux premières minutes et 11 secondes de la Passion de saint Jean, Partie 1 de Bach, les deux premières minutes et 18 secondes de Concerto pour piano no 1 de Chopin, les 53 premières secondes de Supply Air Making Love Out of Nothing At All, les trois premières minutes et 21 secondes de Vangelis ' Mythodea: Mouvement 6, ou encore ces les deux premières minutes de musique signée Hans Zimmer. Chacune de ces pièces contenant un « événement musical » susceptible de déclencher le frisson dans le corps du sujet attentif.
De là, un autre postulat : la peau réagit, parce que le cerveau s’en mêle. Cette fois, c’est une étude menée à Barcelone en Espagne qui s’avère passionnante sur le sujet. Josep Marco-Pallarés, professeur en sciences cognitives ont établi un constat pour l’instant inexplicable : « Entre 3 et 5 % des individus sont dits "anhédoniques" musicaux, et ils n'éprouvent simplement rien à l'écoute d'une mélodie ».
Dans une récente étude évoquée par le site du magazine Science et Vie, le chercheur et son équipe ont identifié le réseau neuronal à l'origine du frisson musical, ou de son absence. Ce sont là 45 personnes, qui ont passé un IRM fonctionnel tout en écoutant de la musique, mais aussi à des jeux d’argent comme le poker.
Car, l’endroit du cerveau qui réagit à la musique serait le même que celui qui est impliqué par la perspective d’un gain d’argent. Tout cela étant lié à la notion de plaisir. Chez les personnes sensibles et très sensibles, la musique, tout comme la perspective de gagner de l'argent, active une structure du cerveau impliquée dans le système de récompense, « le noyau accumbens ». Mais… « Chez les anhédoniques (personnes peu sensibles à la musique), le noyau accumbens s'activait pourtant normalement pendant les jeux d'argent, prouvant ainsi qu'il n'était pas défaillant, mais il ne réagissait que très peu à la musique », a commenté Josep Marco-Pallarés. Le chercheur en déduit que « c'est donc en amont que le goût musical se détermine. Et en effet, la connectivité entre le cortex auditif qui traite les informations sonores, et le noyau accumbens, impliqué dans le système de récompense, était très faible chez les anhédoniques, tandis qu'elle était importante chez les personnes plus réceptives. » Autrement dit, vibrer au son de la musique, ça s’apprend ? Si oui, tout un chacun pourrait peut-être un jour ressentir le frisson musical. A suivre.
Petite expérience sympathique, nous avons sollicité quelques internautes leur demandant quelle pièce musicale leur colle un « authentique frisson ». Voici la playlist constituée par la douzaine de premières réponses.
Nabucco — Riccardo Muti contre les coupes sombres au budget de la Culture
Laurence Mauriaucourt; L'Humanité du 2 février 2017
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