Ce pionnier du blues britannique continue, à 83 ans, de jouer les ambassadeurs de la musique américaine qui a irrigué toute la production rock des cinquante dernières années. À voir ce vendredi 10 mars.
On lui doit une cinquantaine d'albums en autant d'années d'activité. Depuis ses débuts, John Mayall n'a jamais lâché son bâton de pèlerin du blues. À 83 ans, il vient d'enregistrer Talk About That, un nouveau disque solide et inspiré. De nombreux musiciens continuent de le contacter pour le simple plaisir de jouer avec cette légende. «J'ai beaucoup apprécié la présence de Joe Walsh sur notre dernier album. Il nous a proposé de venir jouer de la guitare sur le disque, alors que nous ne nous connaissions même pas», explique-t-il, encore étonné. Depuis la fin des années 1960, Mayall est considéré comme le parrain du blues anglais pour l'influence qu'il a eue sur toute une génération de musiciens devenus des superstars à leur tour. «C'est flatteur, bien sûr, mais ça ne veut pas dire grand-chose en vérité», concède-t-il avec modestie.
En 1966, il mettra la carrière d'Eric Clapton sur orbite avec le premier enregistrement studio de son groupe The Bluesbreakers. Beaucoup considèrent que le guitar hero n'a jamais aussi bien joué que sur cet album, gravé alors qu'il venait de fêter ses 21 ans… «Il était très libre à cette époque de sa carrière. Ça a été une merveilleuse rampe de lancement pour lui», se souvient Mayall. Par la suite, Peter Green (qui partira fonder Fleetwood Mac) et Mick Taylor (recruté par les Rolling Stones) passeront dans les rangs de cet homme qui fera école. «Il s'est vite trouvé que le public a apprécié mes goûts en matière de choix de musiciens», se contente-t-il d'avancer en guise d'explication.
L'aura d'un chef de bande. S'il ne se considère plus comme un missionnaire de la musique noire américaine, il continue de sillonner le monde avec une belle énergie. «Nous sommes un trio, ce qui m'apporte une nouvelle perspective. J'ai toujours aimé me produire en concert», avoue le bonhomme, qu'on peut voir sur scène avant et après le concert en train de monter et démonter le matériel comme un simple technicien. «Parfois, un tour manager nous accompagne, mais j'aime bien donner un coup de main, ça fait partie du boulot», dit-il.
John Mayall - The Devil Must Be Laughing (Album Talk About That, 2017)
Après avoir puisé son inspiration auprès des vieux bluesmen dont il a fait revivre le répertoire, John Mayall a désormais atteint l'âge de ses anciens maîtres. «C'est amusant de se dire que j'ai fini par devenir un ancien à mon tour.» Le succès continu des Rolling Stones et d'autres musiciens issus des années 1960 ne l'étonne pas plus que ça. «Les Stones ne lâcheront pas tant qu'ils s'amuseront à jouer cette musique. Ils n'ont aucune raison de s'arrêter.»
John Mayall n'a jamais été suffisamment reconnu comme un bon chanteur et un bon auteur de chansons, tant son aura de chef de bande et de découvreur de talents aura rythmé ses productions. Pourtant, la très bonne tenue de sa voix sur Talk About That et les chansons inspirées qui l'ornent prouvent qu'il ne démérite pas. «Les gens s'en apercevront peut-être un jour. Ce n'est pas de mon ressort», lâche-t-il juste.
Olivier Nuc le Figaro du 10 mars2017
Aucun commentaire :
Enregistrer un commentaire