Enregistré sur un toit de Bamako, ce second album du duo mêlant violoncelle et kora décroche les étoiles.
Onze janvier. Le rendez-vous a été fixé sur un toit à Bamako. Chaque nuit, le Français Vincent Segal, violoncelle sur le dos, grimpe les escaliers de la maison de son ami malien Ballaké Sissoko, fabuleux joueur de kora, pour un conciliabule sans parole au clair de Lune. Leurs dialogues, capturés sur le vif par les producteurs du label No Format, ressemblent un peu aux field recordings collectés par l’ethnomusicologue américain Alan Lomax, avec la nuit africaine comme décorum sonore. En tendant l’oreille pendant l’écoute du disque, on entend ainsi des moutons qui bêlent au loin sur Niandou et une sirène d’ambulance dans le morceau Passa Quatro.
Suite de Chamber Music (victoire du jazz en 2010), ce second album en duo peut aussi s’apprécier comme une musique savante. Il s’agit d’un mariage noble entre les traditions griotiques ancestrales de l’empire mandingue et l’héritage classique, folk et jazz, de l’Occident. Mais s’en tenir à cette écoute cérébrale serait passer à côté de l’essentiel. Pour entrer véritablement dans la musique de Segal et Sissoko, il faut lâcher prise. Accepter de les suivre dans la nuit, se caler sur leur souffle et leurs inspirations ascendantes, presque spirituelles parfois.
L’enregistrement à Bamako s’est tout de même achevé par une session en studio, pour recueillir la seule voix de l’album, celle de la griotte Babani Koné sur l’élégant Diabaro. D’autres instrumentaux y furent gravés dans les foulées, rassemblées ici dans l’épilogue du disque, plus confortable mais pas moins onirique. Une Musique de nuit traversée par un imaginaire céleste, féerique, et une douce sérénité d’être au monde.
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