A trois sur une moto, on mérite un blâme. Mais quand on est pilote avec deux chiens installés dans le side-car, on a droit à une ovation. Et les applaudissements, mêlés aux klaxons, ont crépité quand l'engin a débarqué.
Il était 14h30, hier sur le parvis du Dôme et ne manquait plus que Marlon Brando et sa Harley pour faire de ce rassemblement la plus grande messe motorisée des dix dernières années à Marseille.
Photo Cyril Sollier
"En mars 2010, on était entre 700 et 1000, se souvenait un organisateur. Aujourd'hui, on va bien dépasser le millier de motards." Des motards réunis sous l'étendard de la FFMC, la Fédération française des motards en colère, venue repousser le spectre de la nouvelle réglementation.
Mais contre quoi donc se dressent les motards ? "Contre toutes les mesures", lancent Naïs Chauvin et Philippe Stoppacher, deux responsables de la FFMC. Ce dernier analyse : "Tout ça, c'est un effet d'annonce. On s'approche de la présidentielle, alors on prend des mesures pour montrer qu'on veut combattre l'insécurité routière." A 15h, les motards s'en sont allés porter leur message dans la ville. Cap sur la Canebière, via le boulevard de la Libération et direction l'A50, par Lieutaud et Cantini. Un cortège, étiré comme des vieilles caravanes du Far West, partant non pas à la conquête des terres mais plutôt des esprits. Un cortège décidé à faire comprendre aux Marseillais que le motard n'est pas un éternel coupable
"La responsabilité est beaucoup moins engagée que celle des voitures." Ni le clown du troisième millénaire. "Vous vous rendez compte,soupira Pierre, un Alsacien, on veut nous faire mettre un gilet fluo. C'est n'importe quoi." Et Naïs développa : "Le problème c'est que l'automobiliste ne nous voit pas parce qu'il n'a pas été formé pour ça. Quand il passe le permis, il faudrait aussi le faire monter sur une moto pour qu'il sache ce que c'est. Il doit connaître les spécificités de l'autre. En fait, la formation à la sécurité routière, c'est à l'école qu'elle doit démarrer." Former les autres, première requête. Mais il y en a d'autres: ne pas supprimer les panneaux avertissant de la présence d'un radar, ne pas prévoir de contrôle technique pour les motos, améliorer les infrastructures, présenter des chiffres sincères de la sécurité routière, écouter toutes les associations, confier la verbalisation à des... êtres humains, etc.
"Et d'une manière générale, il faut arrêter de croire que la vitesse tue, tenta de convaincre le motard alsacien. Les accidents domestiques provoquent quatre fois plus de morts que la route." Mais la route ne voit-elle pas surgir parfois des motards inconscients ? Ceux qui doublent sur la passerelle de Plombières, par exemple. "Il y a aussi des abrutis chez les motards, reconnaît Philippe, mais 70% des accidents sont provoqués par des voitures."
Jean-Jacques FIORITO La Provence du 19 juin 2011