mercredi 4 avril 2018

Camille Bertault swingue en français (Europe 1)

Camille Bertault
Camille Bertault
 
 

 
Sortie de l’ombre grâce à une vidéo sur Facebook, Camille Bertault est désormais sollicitée dans le monde entier.







Jazz, Camille Bertault l'est depuis l'enfance. Elle dit pourtant s'être longtemps cherchée avant de devenir, l'année de ses 30 ans, l'une des jeunes pousses les plus observées du jazz vocal. Un an plus tard, après En vie, son premier opus produit par le label américain Sunnyside, elle publie Pas de géant, fort de 16 titres pour certains composés par elle, pour les autres improvisés et réécrits sous l'influence de Bill Evans, Wayne Shorter ou Serge Gainsbourg. Mais aussi Bach, Ravel ou encore Brigitte Fontaine, dont elle s'est approprié la chanson Conne dans une version azimutée en diable.

Nommé d'après une traduction littérale de Giant Steps, son éclectique Pas de géant salue le standard de John Coltrane par lequel elle a pris son envol du jour au lendemain début 2015. Après un échec à un examen du Conservatoire, elle décide de chanter son dépit sur Facebook avec ce thème de Coltrane et avec ses propres mots (son texte s'intitule Là où tu vas). Sans s'imaginer que sa petite vidéo fera des dizaines de milliers de clics en quelques jours. Sa carrière est lancée.

Camille Bertault - Comment te dire adieu




Le théâtre plutôt que le piano

"J'en ai un peu assez de cette anecdote à la Walt Disney : on dit maintenant que je suis youtubeuse alors que je ne suis pas foutue de mettre en ligne une vidéo ailleurs que sur Facebook!", confie Camille Bertault depuis New York, où elle a rejoint cette semaine son complice pianiste Dan Tepfer, programmé au Winter Jazzfest. "J'ai vécu mille autres choses, cette histoire a peut-être tout déclenché mais… Avez-vous écouté mon disque?" Oui, et on l'a trouvé super! Impressionnant dans sa façon très libre de faire feu de tout bois sans jamais brader son appétit musical ni son exigence linguistique. Car ses textes, écrits en français, captivent autant que la musique, bourrée de références mais jamais prévisible ni fabriquée.

Fille de mélomanes férus de piano, Camille est tombée toute petite dans la marmite du jazz. Son père, ingénieur du son pour le cinéma, promenait sa fille dans les concerts et lui a transmis les bases du bon swing. "Le chant était un tel plaisir que je n'ai jamais vraiment pris ça au sérieux avant 25 ans." Très jeune, mais de façon plus formelle et avec moins de plaisir, elle a aussi appris le piano classique. "J'ai décidé d'arrêter à 18 ans. Cette scène froide où l'on surveille la fausse note ne m'intéresse pas." Elle s'est alors entichée de théâtre et a écrit plusieurs pièces avant de revenir au jazz. Au conservatoire, elle a pu peaufiner sa technique et prendre confiance grâce à la chanteuse Sara Lazarus, "ma seule et unique prof de chant jazz en fin de compte!"

Camille Bertault - Je me suis fait tout petit (Audio)

Le sens autant que les sons

Aujourd'hui sollicitée de Tokyo à Rio en passant par Brazzaville, l'artiste est à surveiller non pour ses éventuelles fausses notes, mais plutôt pour ses appropriations de standards qu'elle magnifie en virtuose. Tout en affirmant un style, libre, spontané, simple et jaloux de sens autant que des sons. "Je suis très attentive aux textes, j'aime le rôle de conteur qui incombe aux chanteurs, cela me vient du théâtre et du cabaret", précise Camille Bertault, qui fut aussi une fidèle du regretté bar à chansons le Limonaire, un établissement parisien dont les habitués étaient des artistes comme Anne Sylvestre, Fantazio, Sarah Olivier, André Minvielle ou Thomas Dalle, figures d'un jazz underground libre et déjanté. "Dans une époque lissée où il ne faut pas effrayer, j'ai besoin de leur liberté, leur humour, leur goût de l'absurde."

Pas de géant ****

CD (Okeh/Sony), sortie vendredi. En concert le 20 (Trianon, festival Jazz Mag) et le 8 mars (Café de la danse) à Paris.

Précédent article à propos de cette artiste: Camille Bertault, le jazz vocal version française (Culturebox)

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