Bernard Lavilliers |
L'artiste aux 50 ans de carrière vient de sortir son 21e album studio, "5 minutes au paradis". Un opus qui fait la part belle à l'engagement et à la poésie.
"J'ai toujours la rage, mais je l'ai mise sous mon bras, je maintiens la distance avec les choses": engagé, passionné, assagi, se livre Bernard Lavilliers à l'occasion de la sortie de son 21e album, "5 minutes au paradis". Bernard Lavilliers, sera en tournée dès novembre 2017, avec neuf concerts à l'Olympia, fêtera ses 71 ans le 7 octobre. "L'âge ne m'a jamais dérangé. Je peux caner là, j'ai eu une putain de vie, je ne la raconterai pas. Même pas à ma femme. Mais l'âge, c'est aussi lié à la fameuse distance dont je parle, il y a la culture qu'on a amassée et ce qu'on peut apprendre encore".
Pour réaliser ce disque à dominante pop-rock, Bernard Lavilliers a fait appelle à la nouvelle génération de la chanson française : Romain Humeau, Florent Marchet, Benjamin Biolet, Jeanne Cherhal, Feu ! Chatterton... Les textes eux sont toujours ancrés dans le réel avec la poésie en bandoulière pour raconter la dureté du monde, ses injustices, sa beauté.
Dans "Croisières méditerranéennes", Bernard Lavilliers contient sa colère face au drame des réfugiés, mais pas son amertume: "Il y a ceux qui font la croisière Costa et ceux qui sont dessous. Je n'ai pas mis cette phrase que j'avais écrite: "Il faut dire que la mer n'a pas le même goût, vue par en dessus ou par en dessous". Je n'ai pas envie de culpabiliser les gens, je veux juste les emmerder pour qu'ils y pensent quand même".
Pour "Vendredi 13" ou le chanteur évoque les attentats de novembre 2015, il a aussi enlevé du texte. "Mais pour laisser de la place aux cordes. J'ai cherché l'épure. La musique est un art abstrait qui s'adresse à l'âme directement, qui suscite l'émotion".
Avec "Bon pour la casse", Bernard Lavilliers raconte la mésaventure d'un ami licencié en une demi-heure... "Numéro 2 de la boîte, il n'avait pas de syndicat. Il ne pouvait pas occuper son bureau avec des armes! C'est arrivé très vite. Pour virer 300 ouvriers c'est beaucoup plus long". Toujours dans le camp de ces derniers, Lavilliers chante "Fer et défaire", qui fustige M. Mittal décideur de la fermeture des hauts fourneaux de Florange.
Deux titres évoquent le Paris du début XXe. Les fantômes de Soutine, Apollinaire, Neruda, Borges sont convoqués dans "Montparnasse - Buenos Aires". Une nostalgie encore plus palpable dans "Paris la Grise". "Il existe encore la trace de Verlaine, Rimbaud, Cendrars. Ce n'est pas qu'un décor. Si je me balade ce soir, je vais ressentir Aragon sur l'île Saint-Louis"...
Cet album magnifique de bout en bout, ou "Charleroi" rappelle "Saint-Étienne", s'ouvre par le saisissant poème de Pierre Seghers "La gloire" et se clôture par le duo très émouvant, de Bernard Lavilliers avec Jeanne Cherhal Jeanne Cherhal, qui nous donne de "L'espoir".
Bernard Lavilliers, Jeanne Cherhal - L'espoir
Lire aussi : Bernard Lavilliers. « La peur, c’est le chantage du pouvoir »
Lorenzo Clément avec AFP Dimanche, 1 Octobre, 2017
Aucun commentaire :
Enregistrer un commentaire