LE PLUS. Leurs concerts se jouent à guichets fermés et c'est en pleine tournée que Shaka Ponk sort un nouvel album, le très attendu "The White Pixel Ape". Le groupe a-t-il réussi à garder sa tonalité déjantée malgré son succès ? Réponse avec notre contributeur Marcus DB. Spoiler : il est séduit.
Shaka Ponk sort ce lundi 17 mars son nouvel album, à l'intriguant titre "The White Pixel Ape" et au sous-titre encore plus intriguant "Smoking isolate to keep in shape" ("fumer dans son coin pour garder la forme").
"The Geeks and the Jerkin' Socks", sorti en 2011, est l'album qui aura propulsé Shaka Ponk au rang de nouvelles rock stars françaises. Dans des tons très pop-rock, c'était très différent des deux précédents albums, moins connus, qui étaient légèrement plus originaux quoique moins élaborés. "The White Pixel Ape" rappelle le style de ces albums peu connus, en y ajoutant une maturité musicale et une affirmation stylistique.
"Wanna Get Free" n'est pas "The White Pixel Ape"
L'alliance entre rock'n'roll et musique électronique, c'est LE point qui a toujours caractérisé Shaka Ponk ; et la chose n'est pas si simple, car ce sont deux styles radicalement opposés.
Pourtant, dans leur musique, le groupe n'hésite pas à alterner des riffs endiablés avec des synthés électros dansants, dans un parfait mariage. Ce mélange pourrait donner un résultat un peu low-cost, avec un rock gentillet et un électro basique, mais à l'inverse, Shaka Ponk approfondit les deux styles, même lorsqu'il les superpose.
On a pu le ressentir dans les commentaires du clip, sur Youtube, les fans de Shaka Ponk ont été pour ainsi dire terrifiés à la sortie de "Wanna Get Free", dont la musicalité est essentiellement, voire exclusivement, électronique. En réalité, ce titre est à "The White Pixel Ape" ce que "My Name is Stain" était à "The Geeks and the Jerkin' Socks" : un morceau de lancement, plutôt commercial, moins original et singulier que le reste de l'album... Tout en restant, il faut le dire, très bon.
Donc, pas de panique : "The White Pixel Ape" ne penche pas spécialement vers un style électro pré-dominant. À l'inverse, le mixage entre les deux styles est bien plus développé que dans "The Geeks and the Jerkin' Socks", qui était finalement assez édulcoré par rapport à ce nouvel album qui, lui, s'apparente à tout sauf à du pop-rock.
Le nouvel album se veut même bien plus osé : certains titres tombent à certains moments dans du hard rock bien dur et méchant, alors que d'autres ont une mélodie dansante purement électro et funky ; parfois, c'est au sein même du morceau qu'il y a cette alternance.
Shaka Ponk réussit ce miracle d'avoir un large public, de pouvoir plaire à n'importe qui, à n'importe quel puriste d'un style musical moderne précis, sans pour autant tomber dans la variété. Qui plus est, l'électro et le rock ne sont pas les seuls styles présents, on peut trouver du rap ou de la funk.
Si on s'évertue à donner des styles à Shaka Ponk, et que l'on finit toujours par citer plus ou moins tous les genres modernes qui existent, c'est parce qu'en réalité, ils semblent avoir inventé un style qui leur est propre. Ils ont construit un univers musical sans bornes. C'est en tout cas un ressenti qui se confirme avec la diversité musicale que l'on peut trouver dans "The White Pixel Ape".
Un album délirant et élaboré
La qualité de cet album repose sur un élément paradoxal assez rare : jamais Shaka Ponk n'a fait un album aussi délirant, partant dans tous les sens, et pourtant musicalement ils n'ont jamais été autant recherchés, élaborés. "Délirant", oui, car avec un second degré évident, ne serait-ce que dans la façon de chanter. Ils ne se prennent pas au sérieux. Pourtant, le travail a dû par ailleurs être conséquent car, musicalement parlant, il y a tout.
"Story O' my LF" est un des bijoux de cet album. L'atmosphère est totalement décalée, avec un trombone de fond répétitif absolument clownesque, et une mélodie sur un chant nonchalant, dans les graves et les aiguës, ponctuée de sessions rap. Dans le même style absurde, on a "Gimme Guitarrrrra", qui est un peu plus rock.
"Monkey On The Wall" et "Scarify", tout aussi délirants, s’apparentent davantage à des balades avec un rythme posé et répétitif, au tempo modéré. "Last Alone" est dans la même veine, mais se joue beaucoup plus sur la nuance : le refrain rock rompt avec le groove reggae du reste de la piste ; sans oublier une douce mélodie électro fabuleuse sur la fin.
"Black Listed" est unique en son genre également. Le morceau commence et termine sur un hard rock ultra-rythmé qui ne relâche jamais la pression, ponctué en plein milieu d'une partie plus calme, dans un funk aux sonorités électroniques. C'est la parfaite illustration du mélange de rock et d'électro. "Wotz Goin'ON", à la limite du métal sur une courte durée, et "An Eloquent" sont dans le même esprit, avec ce petit air funky rafraîchissant qui part dans en rock puissant lors des refrains.
Shaka Ponk a aussi, et peut-être "enfin", son titre calme et mélancolique : "Heal Me Kill Me". Jamais ils ne nous avaient proposé un tel titre. Le rythme est doux, la mélodie reposante, et le morceau se finit en beauté sur un doux violon qui nous transporte loin.
"Lucky G1rl" et "Altered Native Soul" apportent quant à eux simplement une belle dose d'énergie en étant dans un rock punchy à souhait. L'album se clôt sur "6xLove", dont le chant collégial, les riffs de guitare, et les petits agréments sonores supplémentaires typiques de Shaka Ponk, procurent une intensité "épique".
Une efficacité redoutable du "shaka style"
Si chaque titre a sa particularité, en procurant donc une parfaite diversité, l'album en lui-même dégage une seule et même chose : une énergie divertissante poussée à son plus haut point. "The White Pixel Ape" transmet un maximum de folie à l'auditeur, mais le fait avec classe, et avec une recherche musicale qui force le respect.
Il y a une vraie indépendance, dans le sens où Shaka Ponk a résisté, malgré son succès, à se conformer à des normes. Si les treize morceaux ne se ressemblent pas, ils sont tous liés par un style véritablement à part entière, qui mixe différents genres avec humour mais avec un beau travail de composition, pour un résultat des plus uniques et incomparables sur la scène musicale française... et même internationale.
Les paroles sont un élément qui passe quelque peu au second plan dans cet album, par rapport au précédent. Non pas qu'elles soient sans intérêt, mais c'est que l'on y fait pas attention car elles fusionnent littéralement avec la musique instrumentale. C'est le seul petit bémol... si tant est que ce soit vraiment un bémol, pour une musique "festive".
Shaka Ponk nous embarque dans son délire, l'énergie des titres est contagieuse et ils remplissent donc à merveille leur rôle. Les morceaux sont, en plus de cela, taillés pour la scène, mais dans cet album, ils font le show dans notre salon, notre voiture, ou notre chambre, sans même monter sur les planches.
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