Johnny Winter est plus qu’un guitariste blues surdoué : c'est une légende.
Au regard d’une discographie officiellement entamée en 1959, le natif de Leland, Mississippi, ayant grandi à Beaumont, Texas, a bien souvent connu les honneurs rétrospectifs.
Mais le présent coffret, supervisé par l’intéressé en personne, propose en 4 CD et 56 titres (puisés entre 1968 et 2011) : une idéale compilation.
Son aspect chronologique, si évident soit-il, n’est pas dénué de bon sens : c'est le fruit d’une exploration des 27 références du prodige, de "The Progressive Blues Experiment" à "Roots".
Nonobstant quelques écarts, le parcours de Johnny Winter reste exemplaire dans sa fidélité aux commandements du blues.
C'est ce que confirme sans détour le titre de ce recueil qui ne néglige nullement les enregistrements publics, où tant de fois il a su s’illustrer.
Légende du blues... mais aussi du rock
Du trio initial à l’éphémère Johnny Winter And, en passant par la formation avec son cadet Edgar, son impressionnante virtuosité, sa maîtrise à nulle autre du slide et sa voix rauque, ont illuminé le répertoire blues (Bobby Blue Band, Howlin’ Wolf, Slim Harpo, Sony Boy Williamson II, Lightnin’ Hopkins, Robert Johnson, Jimmie Gordon…).
Mais aussi les standards rock ("Highway 61 Revisited" de Bob Dylan, "Johnny B. Goode" de Chuck Berry, "Jumpin’ Jack Flash" des Rolling Stones…).
Tout à la fois héritier et passeur la tradition du Delta, cet admirateur de Willie Dixon a toujours fait montre d’un incroyable syncrétisme, renouant les liens avec l’incandescence des primitifs (Carl Perkins, Jerry Lee Lewis).
Un héritage country, et une incandescence primitive
Tout en infusant savamment l’héritage country & western, et restant à l’écoute de ses contemporains.
De Jimi Hendrix, il adoptera avec aisance l’art et la formule du trio. Puis il s’inscrira de facto dans une longue filiation, qui, de Blue Cheer à Radio Moscow, en passant par ZZ Top ou Jon Spencer Blues Explosion, porte son évidente marque.
Électrique, heavy, boogie, proto-stoner, soliste disert mais jamais bavard, Johnny Winter rappelle également cette époque du "guitar-hero" triomphant en couverture des magazines spécialisés.
Cette aristocratie typiquement 66/74, au sein de laquelle même un albinos chétif à la chevelure immaculée de druide pouvait, sur la foi d’un article de "Rolling Stone", devenir une superstar, signer un contrat pharaonique (Columbia lui versa une avance de 600 000 dollars pour son premier album !), vendre des disques et tourner à guichets fermés.
Malgré la poudre, l'obsession de la musique
Et, en dépit des coups du sort (la poudre et la dépression aux motifs suicidaires), des changements de labels, voire même des mouvements musicaux à la mode, John Dawson Winter III (pour l’état civil) a suivi le même chemin que ses contemporains (Canned Heat ou Ten Years After en tête) : jouer.
Inlassablement.
En studio. En concert. Animé par un feu qui ne saurait s’éteindre, décidé à perpétuer le genre en l’incarnant jusqu’à l’obsession.
Une flamboyance transcendant les âges, ayant essaimé chez Stevie Ray Vaughan, Slash ou Derek Trucks.
Dernier parmi les légataires de la matrice originelle, l’homme peut sembler anachronique dans une époque beaucoup plus prompte à glorifier des DJs levant les bras en l’air (comment font-ils pour mixer ?).
Mais il n’en demeure pas moins une incontestable référence car son histoire a fait l’Histoire. Tant de musiciens en rêvent.
Johnny Winter : "True To The Blues : The Johnny Winter Story" (Sony Music/Legacy)
http://leplus.nouvelobs.com/contribution/1141934-true-to-the-blues-the-johnny-winter-story-la-compil-ideale-pour-les-70-ans-du-surdoue.html
http://www.legacyrecordings.com/a/#/news/johnny-winter-70th-birthday-commemorated-with-box-set-true-to-the-blues-the-johnny-winter-story/164/1/
Par Marc Bertin ,Mélomane
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