Jazz. Herbie Hancock, la musique du cœur (L'Humanité)

Herbie Hancock

Après des cimes de splendeur à Jazz à Vienne, le phénix du piano s’apprête à embraser Marseille Jazz des cinq continents et Jazz in Marciac.

 

Fara C. L'Humanité, le 26 juillet 2017

  

Parmi les plus beaux concerts du cru 2017 de Jazz à Vienne, figure sans conteste celui de Herbie Hancock, qu’attendent avec impatience les festivaliers du Marseille Jazz des 5 continents et de Jazz In Marciac. Chacune de deux ces manifestations ayant sa propre personnalité et présentant les artistes en des contextes différents, des fans du légendaire pianiste, subjugués, s’y rendront pour réécouter leur héros. Pour trois jeunes gens, c’est direction le Sud, jusqu’à la ville phocéenne. « Marseille est sur notre chemin, explique l’un d’eux. On était déjà allés en 2014 à Jazz des 5 continents, où Hancock avait joué en duo avec le saxophoniste Wayne Shorter, au Palais de Longchamp. C’était magique, aussi. Aucun des deux ne faisait la course aux notes. C’était vraiment la musique du cœur ». Ouah ! On est touché par tant de pertinence et de sensibilité. Ils ont raison, ces garçons, d’opter pour le Marseille Jazz des 5 continents. Car, en première partie, l’Eole du saxophone, Emile Parisien, commémorera les dix ans de la mort du pionnier Joe Zawinul, avec de prestigieux invités (Paco Séry, Linley Marthe, Aziz Sahmaoui, Manu Codjia, Tony Paeleman et Mino Cinelu), comme il l’a fait à Vienne, le 4 juillet, et offert un des moments les plus forts du festival isérois.


Artiste le plus souvent convié à Jazz à Vienne depuis 1981, Hancock a investi quinze fois le Théâtre antique. Jean-Paul Boutellier, programmateur historique, s’épanche: « Mon meilleur souvenir musical de Herbie à Vienne est l’hommage à Miles avec Wayne Shorter et Marcus Miller, notamment le rappel en compagnie de John Scofield. Sur le plan humain, chaque rencontre avec lui est super, Herbie est une personnalité attachante et zen ».


Pour un couple de retraités de Lyon, c’est à Marciac qu’ils retourneront prêter oreille à l’humble génie. « Ce soir, dans le Théâtre antique, nous avons vécu un rare bonheur, confie madame. Nous voudrions le goûter encore. En ces temps difficiles, on a besoin de ce genre de musique, à la fois méditative et joyeuse. Ca fait longtemps qu’on a envie de découvrir Jazz In Marciac, dont on nous dit le plus grand bien. Il paraît qu’il y a un immense chapiteau monté sur le terrain de rugby du village. Le 40e anniversaire nous fournit une formidable opportunité. Comme nous voulons voir Dee Dee Bridgewater, cela tombe bien, puisqu’elle se produira un jour après Herbie ».


Sémillant jeune homme de 77 ans, Herbie s’est entouré de complices parmi les plus inventifs: Terrace Martin, saxophoniste, claviériste et producteur prisé (de Stevie Wonder, Kendrick Lamar…), le guitariste franco-béninois Lionel Loueke, le bassiste James Genus (aux côtés de Hancock depuis 2008) et Vinnie Colaiuta, ancien batteur de Zappa. A Vienne, au fil de nouveaux titres et de classiques hardiment revisités (Watermelon Man, Chameleon…), le phénix des claviers accordait une bel espace de jeu à ses camarades; parfois, il s’arrêtait et les regardait avec un sourire affectueux. La chevauchée groovy de James Genus, l’arc-en-ciel de rythmes et de couleurs peint par Vinnie Colaiuta, les harmonies aux fragrances africaines de Lionel Loueke et l’énergie saute-frontières de Terrace Martin ont porté le maître jusqu’à des cimes de splendeur.


Fara C., L'Humanité le 26.07.2017

Herbie Hancock & Wayne Shorter @Jazz_in_Marciac : Mardi 29 Juillet 2014